Critique – Gamera vs. Gyaos (1967)

Après le décevant Gamera vs. Barugon, il est l’heure de découvrir le troisième film de la franchise Gamera. Sorti en 1967, Gamera vs. Gyaos marque le retour en force de la tortue géante contre un adversaire qui va devenir iconique. Plus divertissant, mieux rythmé, le long métrage est une réussite qui me rassure pour la suite.

Une série de tremblements de terre se produit au Japon et provoque l’éruption de plusieurs volcans. Cela réveille également le monstre géant Gyaos, qui demeurait endormi sous terre à proximité du mont Fuji. Ce reptile volant va perturber le quotidien des habitants vivant à côté, ainsi que la construction d’une autoroute. Heureusement, ils peuvent compter sur l’aide de Gamera pour lutter contre ce nouvel ennemi.


Gamera vs. Barugon n’a pas été le succès espéré par le studio Daiei. Cependant, un nouveau film Gamera est rapidement mis en chantier et se destine à un public jeune. Noriaki Yuasa, le réalisateur du premier film, fait son retour à ce poste ainsi qu’en tant que directeur des effets spéciaux. Le scénario est l’œuvre de Niisan Takahashi qui écrit le film comme une réponse aux films Frankenstein vs. Baragon (1965) et La Guerre des monstres (1966) où l’on peut voir le monstre de Frankenstein. Ainsi, le nouvel adversaire de Gamera s’inspirera de Dracula. Il reprend aussi des éléments d’actualité en faisant référence à la lutte de Sanrizuka, un conflit entre le gouvernement japonais et un groupe d’activistes opposé à la construction du nouvel aéroport de Tokyo. On trouve aussi une référence au parc d’attraction Fuji-Q Highland ouvert en mars 1968, soit un an après la sortie du film.

Contrairement à Gamera vs. Barugon, ce film se concentre pleinement sur les kaijus à la manière du premier opus. Gyaos apparaît rapidement après un build-it efficace nous faisant craindre la menace. C’est tout l’inverse de Barugon qui était dévoilé de but en blanc après une longue attente et quelques vagues allusions sur sa prétendue dangerosité. Gyaos s’impose rapidement comme un ennemi sérieux et destructeurs en nous montrant de quoi il est capable. La suite de film se focalisera sur lui et sur comment le vaincre. On en apprend plus sur ses capacités et son métabolisme, ce qui toujours un point que je trouve très intéressant pour élaborer un plan pour en venir à bout. Cela fait partie des points que j’apprécie particulièrement dans Pacific Rim et Shin Godzilla : on ne vainc pas le monstre parce qu’on tape fort dessus, mais parce qu’il est un être vivant avec ses propres faiblesses physiques. Le film a d’ailleurs souvent l’occasion de nous montrer que Gyaos et Gamera sont des êtres fragiles malgré leurs tailles, qu’ils ne sont pas indestructibles. À plusieurs reprises, ils se blessent grièvement lors de scènes remplies d’hémoglobine de monstre. Gamera se fait presque trancher le bras, et Gyaos se fait arracher une patte et mordre à la jugulaire.


Gamera est aussi plus présent et sa présence est mieux justifiée. Son lien avec les enfants est davantage mis en avant sans pour autant être dit explicitement. Cette fois, il noue une amitié avec Eiichi, un garçon vivant dans le village à proximité. La sous-intrigue avec les humains et le chantier de construction n’est pas la plus intéressante, mais permet d’avoir des personnages secondaires sympathiques où il n’y a pas vraiment de dichotomie entre gentil et méchant. Tous doivent œuvrer pour un but commun et mettent leurs querelles de côté. Il manque d’un peu plus de caractérisation pour certains, en particulier Shiro Tsutsumi qui est pourtant « l’humain principal ». Les kaijus restent le centre d’intérêt du film et nous proposent les scènes les plus marquantes (sans surprise).

Les scènes de combats entre Gamera et Gyaos sont beaucoup plus intéressante à suivre que celle contre Barugon. La chorégraphie est plus dynamique et utilise les capacités de chaque monstre à leur avantage. En particulier celle de Gamera qui passe beaucoup de temps à se protéger dans sa carapace et à utiliser des réacteurs. Cependant, je regrette un manque de vitalité dans l’apparence des costumes et la rigidité de certaines animations. Je pense à plusieurs scènes aériennes qui sentent fort la maquette inanimée suspendue à des fils. Le manque de vie dans les costumes se ressent surtout dans les yeux des monstres. C’est dommage, car en dehors de quelques incrustations (très) moche, les effets spéciaux sont vraiment bon. Je pense notamment à la bluffante maquette des paysages du mont Fuji que l’on peut apercevoir lors d’un plan aérien. L’intégration des scènes à effets spéciaux est bien faite avec des astuces de mises en scènes très simples, comme celui de garder des éléments bien repérables d’un plan sur l’autre. Par exemple, un véhicule qui démarre sur un plan, remplacé par une maquette en mouvement sur le plan suivant, puis qui redevient un véhicule réel dans le troisième plan. On voit aussi avec la grande roue à côté de laquelle Gamera vient déposer Eiichi. J’ai d’ailleurs beaucoup apprécié la séquence de sauvetage de l’enfant, qui propose tout un tas d’élément pour faire croire aux interactions avec les montres : que ce soit la création d’une main géante de Gyaos ou la construction d’un plateau pour faire la carapace de Gamera.


J’apprécie aussi beaucoup les nombreuses scènes tournées en extérieurs, parfois en décor naturel. On ne retrouve pas ce côté factice comme c’était le cas pour Gamera vs. Barugon. Il suffit de comparer l’atmosphère entre le décor du village indigène du précédent film, et celui du village dans la montagne dans celui-ci. Ça renforce le côté authentique du long métrage et permet d’avoir une belle lumière. Il semblerait que des scènes entre Gamera et Gyaos ont aussi été tournées en extérieur pour avoir cette lumière.

Gamera vs. Gyaos est incontestablement meilleur que son prédécesseur. C’est une suite qui se place dans la lignée du premier film, en mettant en avant ses monstres, et en proposant des effets spéciaux convaincants. Le divertissement est présent, sans scènes à rallonge ou de passages paraissant inutiles. Les explications concernant Gyaos sont satisfaisantes et en font un bon antagoniste dont il est difficile d’utiliser les faiblesses pour le vaincre. Dimanche prochain, ce sera au tour de Gamera vs. Viras !

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